Auteur : Mishima Yukio (Hiraoka Kimitake)
Ouvrage : La mort en été
Année : 1953
Lien de téléchargement : Mishima_Yukio_-_La_mort_en_ete.zip
La plage d’A., près de l’extrémité sud de la péninsule d’Izu, est encore intacte. On peut s’y baigner. Il est vrai que le fond de l’eau y est inégal et rocailleux, et que les lames y sont un peu rudes ; mais l’eau est propre, la plage descend en pente douce vers la mer, et dans l’ensemble les conditions pour faire de la natation y sont excellentes. En grande partie parce qu’elle est située à l’écart, la plage d’A. ne souffre ni du bruit ni de la crasse des stations balnéaires plus proches de Tokyo. Elle est à deux heures d’autocar d’Ito. La seule auberge, ou presque, est l’Eirakusò, qui loue aussi des pavillons. Il n’existe qu’une ou deux de ces minables buvettes qui encombrent en été la plupart des plages. Le sable est abondant et blanc, et à mi-chemin de la mer un rocher coiffé de pins surplombe si bien la plage qu’on le croirait posé par un paysagiste. À marée haute il disparaît à moitié sous l’eau. Et la vue est belle, quand le vent d’ouest a balayé la brume de mer, on aperçoit les îles au large, Oshima tout près et Toshima un peu plus loin, et entre les deux une petite île triangulaire qui s’appelle Utoneshima. À l’extrémité de la presqu’île de Nanago se situe le cap Sakai, qui fait partie du même massif montagneux, et plonge profondément ses racines dans la mer ; et au-delà, le cap qu’on appelle le Palais du Dragon de Yatsu, puis le cap Tsumeki, où tournoie chaque nuit, à l’extrémité sud, le rayon d’un phare. Dans sa chambre de l’Eirakusò, Tomoko Ikuta faisait la sieste. Elle était mère de trois enfants, mais à voir sa silhouette endormie personne ne l’aurait soupçonné. On lui voyait les genoux, sous sa robe droite, un peu courte, en coton rose pâle. Ses bras ronds, son visage lisse et ses lèvres un peu gonflées avaient une fraîcheur enfantine. Un peu de sueur marquait le front et le creux près des narines. Les mouches bourdonnaient, et l’air était brûlant comme l’intérieur d’un four. Le coton rose se soulevait et s’abaissait si légèrement qu’il semblait incarner la touffeur du lourd après-midi. Les autres pensionnaires de l’hôtel étaient pour la plupart sur la plage. La chambre de Tomoko était au premier étage. Il y avait sous sa fenêtre une balançoire blanche pour les enfants. Des chaises étaient disposées sur la pelouse, de quelques centaines de mètres carrés, des tables aussi, et le piquet d’un jeu d’anneaux. Les anneaux étaient dispersés sur la pelouse. Personne n’était en vue, et le bourdonnement, de temps à autre, d’une abeille se perdait dans le bruit des vagues par-delà la haie. Les pins montaient jusqu’à la haie, et cédaient ensuite au sable et au flot. Un ruisseau passait sous l’auberge. Il formait un étang avant de se jeter dans l’océan, et une quinzaine d’oies s’y éclaboussaient et y criaillaient sans retenue quand elles y mangeaient tous les après-midi. Tomoko avait deux fils, Kiyoo et Katsuo, qui avaient six ans et trois ans, et une fille, Keiko, qui en avait cinq. Tous trois étaient à la plage avec Yasue, la belle-soeur de Tomoko. Tomoko ne se sentait aucun embarras à demander à Yasue de garder les enfants pendant qu’elle-même faisait la sieste. ...
Aubert Edouard - La vallée d'Aoste
Auteur : Aubert Edouard Ouvrage : La vallée d'Aoste Année : 1860 Lien de téléchargement :...